Conférence / “La « philosophie orientale spirituelle » de Toshihiko IZUTSU (井筒俊彦) – une interprétation phénoménologique -“, NAGAI Shin, Groupe d’étude de philosophie japonaise (10 avril 2021, 9h30-10h30)

Le Groupe d’étude de philosophie japonaise  (Institut français de recherche sur l’Asie de l’Est, Inalco / Université de Paris / CNRS, F-75013 Paris) organise une conférence Samedi 10 avril 2021 de 9h30 à 10h30 (heure de Paris, 4h30 – 5h30 PM l’heure de Tôkyô) suivie d’une discussion (fin de la séance prévue à 11h30 (6h30 PM l’heure de Tôkyô).

NAGAI  Shin  (Université Tôyô, Tôkyô) y présentera une communication intitulée “La « philosophie orientale spirituelle » de Toshihiko IZUTSU (井筒俊彦) – une interprétation phénoménologique –“.

Pour accéder au lien Zoom, merci de contacter :  takako.saito@inalco.fr

contact courriel : takako.saito@inalco.frakinobukuroda@gmail.comarthur.mitteau@univ-amu.frsimon.ebersolt@gmail.com

Résumé de l’intervention :
Si le travail de Toshihiko Izutsu (1914-1993), un des philosophes les plus importants du Japon contemporain, n’a pas été, jusqu’à aujourd’hui, apprécié à sa juste valeur, cela tient sans doute au fait que la vaste étendue de son travail dépasse les cadres trop convenus et trop étroit la plupart du temps de la « recherche » en philosophie. 

Cette étendue vient de la formation assez complexe de sa pensée : il se considère, en effet, comme linguiste plutôt que comme philosophe en raison de l’intérêt particulier qui l’anime à l’égard du langage, particulièrement du langage poétique surréaliste ou de celui de la « magie ».  D’autre part, le noyau existentiel de sa pensée provient de son expérience du Zen, qu’il commença à pratiquer dans son enfance sous la direction de son père. En outre, ses recherches sur les traditions spirituelles diverses de l’Extrême-Orient, telles que le bouddhisme, mais aussi, par ailleurs, sur l’islam et le judaïsme, sont décisives dans sa carrière. Celles qu’il a conduites sur le mysticisme islamique sont si appréciées qu’il est généralement considéré comme un spécialiste de rang mondial dans ces études, alors qu’il refusait pour lui-même quelque « spécialité » que ce soit. Enfin, derrière ses recherches sur le mysticisme islamique, il y a tout un travail novateur sur la philosophie grecque ancienne, représenté par son premier ouvrage Philosophie mystique(『神秘哲学』), dans lequel il interprète la philosophie grecque ancienne dans sa totalité dans un horizon mystique, allant jusqu’à la caractériser, étonnamment, d’« orientale » car pour Izutsu, mystique et orient sont intrinsèquement liés. 

En mobilisant l’immense culture qu’il avait acquise à travers les recherches que nous venons d’évoquer, Izutsu a publié, dans la dernière phase de son activité intellectuelle, Conscience et essence (『意識と本質』), une œuvre dans laquelle se reflètent et se rassemblent ses travaux antérieurs et où il propose l’idée d’une « philosophie orientale spirituelle » (精神的東洋哲学). Celle-ci consiste en une réinterprétation, grâce à un traitement tant linguistique que phénoménologique, des textes des traditions philosophico-religieuses de l’Orient, dont celles du Japon, dans l’horizon d’un système de la pensée universelle. Autrement dit, en donnant aux traditions orientales diverses une certaine « unité », semblable à celle de la philosophie occidentale, Izutsu vise à mettre la « philosophie orientale » ainsi méthodiquement construite au service de la philosophie contemporaine universelle, au lieu de l’enfermer exclusivement dans les recherches historiques spécialisées.   

Dans notre exposé, nous constaterons d’abord la nécessité de concevoir la « philosophie japonaise », ou, plus largement, la « philosophie orientale » à l’époque moderne du Japon comme l’horizon dans lequel Izutsu a conçu sa propre « philosophie orientale spirituelle ». Pour ce faire, nous commencerons par présenter dans ce contexte la philosophie de Kitarô Nishida comme une réussite exemplaire de cette exigence historique et procèderons, à cette occasion, à une mise au point terminologique relative à sa compréhension de l’« Oriental ».

Nous traiterons ensuite de la « philosophie orientale » d’Izutsu en rapport avec celle de Nishida. Nous tenterons, en effet, d’une part, de montrer que dans l’expression « philosophie orientale spirituelle », l’épithète « spirituel » doit être compris comme exprimant la pratique de la réduction phénoménologique. D’autre part, nous soulignerons, du point de vue de la phénoménologie transcendantale, la nécessité de la « réduction transcendantale radicalisée ». Nous éclairerons le processus de cette réduction en nous référant au diagramme en triangle qu’utilise Izutsu pour montrer le processus de la pratique spirituelle. Enfin, nous analyserons la phénoménalité de l’ « Orient spirituel » ainsi atteinte dans la forme exemplaire du Mandala.

Colloque / Montesquieu et l’Asie. Traductions, circulations et usages de “L’esprit des lois” hors Europe Occidentale (Université Bordeaux Montaigne, 4-5 mars 2021)

Organisateur : Eddy Dufourmont

Contact : eddy.dufourmont@u-bordeaux-montaigne.fr

Affiche et programme en version PDF ici.

Argumentaire

De l’Esprit des lois est un monument qui déroute à double titre ; tout d’abord par son ampleur (plus de mille pages pour quatorze ans de travail), ensuite par sa difficulté de lecture. L’œuvre maitresse de Montesquieu a suscité une grande diversité d’interprétations : salué comme le moment fondateur de la science politique, certains voient en lui l’expression du républicanisme mo- derne alors que d’autres préfèrent le ranger dans le crédo libéral. La multipli- cité des thèmes abordés, dans un désordre apparent, ne manque pas de troubler : dans sa recherche des causes physiques et morales des institutions, Montesquieu propose tour à tour une théorie sur la loi, sur les types de gou- vernements ; une réflexion sur la liberté politique ainsi qu’une théorie des climats et de « l’esprit général ». Cet ouvrage fut aussi celui par lequel Montesquieu donna matière au concept de despotisme qu’il inventa, rassemblant sous l’adjectif « oriental » associé à ce régime politique, entre autres, les empires Ottoman et Perse, la Chine et le Japon.

Comment ce monument des Lumières a-t-il été lu hors d’Europe, notamment dans les pays que Montesquieu rangea dans la catégorie du despotisme ? Quels défis représentèrent la traduction de l’œuvre et la compréhension des thèmes abordés ? Quel en fut l’usage dans un contexte d’introduction de la philosophie politique européenne ? Ces questions qui s’imposent très tôt dans le Japon moderne (où L’Esprit des lois est traduit dès 1875), concernent certainement aussi une bonne partie des pays d’Asie ou d’ailleurs. Du moins tels sont les thèmes que nous invitons tous les spécialistes de langues non-européennes à discuter. La réflexion devra s’orienter vers l’analyse de la traduc- tion de tout ou partie des thèmes constitutifs de l’ouvrage, avec le souci de s’inscrire dans la perspective du transfert culturel et de l’histoire intellectuelle.

The Spirit of the Laws is a difficult work to read, for two reasons; firstly by its size (more than a thousand pages written during fourteen years), second by its difficulty of interpretation. Montesquieu’s masterpiece has given rise to a great diversity of interpretations: hailed as the founding moment of political science, some see in him the expression of modern republicanism while others prefer to put it in the liberal creed. The multiplicity of themes tackled, in an apparent disorder, can puzzle the reader: in his search for the physical and moral causes of institutions, Montesquieu proposes a theory on the law, on the types of government; a reflection on political freedom as well as a theory of climates and the «general spirit». This book was also the one by which Montesquieu gave substance to the concept of despotism he invented, bringing together under the adjective «oriental» associated with this political regime, the Ottoman and Persian empires, China and Japan.

How this monument of the Enlightenment was read outside Europe, especial- ly in the countries Montesquieu ranked in the category of despotism? What challenges represented the translation of the work and the understanding of the topics? What was the use in a context of introduction of European political philosophy? These questions, which are very early in modern Japan (where The Spirit of the Laws is translated as early as 1875), certainly concern a good part of the countries of Asia or elsewhere and we invite all specialists of non-European language to discuss them. The analysis will focus on all or part of the constituent themes of Montesquieu’s book, in the perspective of the cultural transfer and the intellectual history.

Programme

Jeudi 4 mars 2021

9h-9h15 : Introduction (Eddy Dufourmont)

9h15-10h45 : 1ère séance. De l’esprit des lois en Russie et dans le monde arabe

9h15-10h : Véronika Altashina (Professeur, Université d’Etat de Saint-Pétersbourg).

L’Esprit des lois dans l’Еmpire russe : Pro et Contra

10h-10h45 : Abdesselam Cheddadi (Professeur émérite, Université Mohammed V)

Montesquieu et les idées des Lumières en Egypte au XIXe siècle.

10h45-11h30 : Laib Khemissa (MCF Université de Batna) et Chafika Bouraiou (MCF Université Larbi ben M’Hidi)

La présence de Montesquieu, dans les écrits politiques de Rifa’a Rafi al-Tahtawi et Bourhan Ghalioune

11h30-13h : pause

13h-15h15 : 2ème séance. De l’esprit des lois en Asie de l’Est

13h-13h45 : Soh Jean Hyoung (postdoctorante, Seoul National University, Séoul)

The translation of The Spirit of the Laws and the meaning of ‘the separation of power’ in Colonial Korea

13h45-14h30 : Wang Xiaoling (MCF, Université Paris Diderot) 

L’influence de la pensée politique de Montesquieu en Chine

14h30-15h15 : Eddy Dufourmont (MCF HDR, Université Bordeaux Montaigne)

L’Esprit des lois comme objet et agent de transfert culturel au Japon : l’enjeu de sa traduction à l’aube de l’époque moderne (1868-1889).

Vendredi 5 mars 2021

9h-11h30. 3ème séance. Un autre regard asiatique sur De l’esprit des lois 

9h-9h45 : Kim Minchul (MCF, Sungkyunkwan University, Séoul)

Montesquieu in the French Revolution

9h45-10h30 : Brij Tankha (Professeur émérite, Institute of Chinese Studies, Delhi)
Varieties of Despotism : Montesquieu on Asia

10h30-11h15 : Lee Junhyung (Doctorant, Sungkyunkwan University, Séoul)

Montesquieu in mid- to late-twentieth-century South Korea

11h15-13h : pause

13h-15h15 : 4ème séance. De l’esprit des lois en Asie du Sud-Est

13h-13h45 : Quang Pham Van (MCF, Université des sciences sociales à Ho Chi Minh Ville)

De l’idée des lumières de Montesquieu à la pensée de Phan Châu Trinh

13h45-14h30 : Eugénie Mériau (postdoctorante ENS Lyon, Institute for Global Law and Policy, Harvard Law School)

Montesquieu, le Siam et l’Esprit des Lois : Circulations croisées du despotisme oriental

14h30-15h15 : Etienne Naveau (PU, CERLOM/INALCO)

La réception de Montesquieu en Indonésie
 

15h15-16h : discussion générale.

Conférence / “Du matérialisme historique au concept d’aidagara. Analyse d’une appropriation des idées marxiennes par Watsuji Tetsurô 和辻哲郎” (6 mars 2021, 14h-15h30)

Dans le cadre de la prochaine séance du groupe d’étude de philosophie japonaise, Grégoire JOUCLAS (Inalco) fera une présentation intitulée “Du matérialisme historique au concept d’aidagara. Analyse d’une appropriation des idées marxiennes par Watsuji Tetsurô (和辻哲郎)

Date et horaire : samedi 6 mars 2021, de 14h à 15h30.
La conférence aura lieu sur Zoom. Pour obtenir le lien d’accès, merci de contacter l’un des organisateurs de la séance (takako.saito@inalco.fr,akinobukuroda@gmail.comsimon.ebersolt@gmail.com, arthur.mitteau@univ-amu.fr).

Résumé :

         Il est peu connu que Watsuji Tetsurô 和辻哲郎 (1889-1960), important philosophe japonais du XXe siècle, s’est servi des écrits de Marx comme d’un socle lui permettant d’établir et de justifier l’élément le plus fondamental de son système éthique : le concept d’interrelation (aidagara 間柄), qui structurerait selon lui 

l’existence humaine.

        Jusqu’ici, l’interprétation et l’utilisation des écrits marxiens par Watsuji n’avait pas fait l’objet d’une recherche approfondie. Pourtant, certains chercheurs japonais n’ont pas manqué d’en souligner l’importance. Le présent travail s’est donné pour but d’analyser une autre facette de Watsuji, que l’on qualifie généralement de conservateur : en vérité, il a considéré avec attention et intégré dans son système de pensée diverses théories philosophiques, indépendamment de leur couleur politique.

        Nous verrons en premier lieu comment la pensée marxienne s’imbrique dans la genèse de l’éthique watsujienne. Il s’agira de revenir aux sources, c’est-à-dire aux deux principaux travaux de Watsuji dans lesquels nous retrouvons la totalité de son analyse du matérialisme historique : Rinrigaku (Éthique, 1931) et Ningen no gaku toshite no rinrigaku (L’éthique en tant qu’étude de l’humain, 1934). Théoriquement, Watsuji s’est servi de la nature sociale de l’existence humaine décrite par Marx pour justifier une sorte de primauté de l’interrelation, et pour dépasser les autres théories philosophiques occidentales, qualifiées de trop abstraites ou individualistes. Marx lui a permis d’une part de justifier un projet éthique ancré dans les réalités concrètes et quotidiennes de l’existence, d’autre part de dépasser les dualismes traditionnels (individu-société, sujet-objet, nature-culture, etc.) pour penser l’existence en tant que structure relationnelle.

        Nous verrons dans un second temps, par l’analyse comparée de ces deux sources, la manière dont Watsuji manipule les textes et le vocabulaire afin de justifier un système éthique prenant racine dans la culture et la pensée japonaises. Il s’agit également de comprendre, en recontextualisant brièvement, comment ces écrits s’inscrivent dans les problématiques de leur époque. Par exemple, Watsuji s’est servi du jeune Marx pour contrer les théories marxistes de son époque, dont il critiquait leur vision matérialiste par trop simpliste de l’existence humaine (surtout par crainte des conséquences politiques et sociales). Son opposition à ce sujet est particulièrement intéressante : elle révèle les tensions et contradictions de son système qui se veut une sorte de dépassement de la totalité des penseurs qu’il a analysés.

       Si Watsuji a cherché par prudence à minimiser l’influence marxienne dans ses écrits postérieurs à Rinrigaku, la théorie de l’homme social de Marx, paradoxalement, s’imbrique particulièrement bien dans un système éthique qui met l’empereur et la nation au sommet de la hiérarchie des communautés, l’influence hégelienne commune aux deux penseurs étant, pensons-nous, la principale raison de cet état de fait.

Colloque : Les humanités “post-humaines” (samedi 14 novembre)

【Organisateurs】
Institut de Recherches en Sciences humaines de l’Université de Kyoto / Institut français du Japon de Kansai-Kyoto
(Traduction simultanée)

【Date et horaire】
-Samedi 14 novembre à 9h00 heure française (17 heures heure japonaise)

【Sommaire】
Il y a déjà longtemps que l’on parle de la « fin de l’homme » : mondialisme de plus en plus affirmé, essor considérable de la technologie avec le génie génétique ou l’intelligence artificielle, destruction environnementale et changement climatique, propagation de la crise pandémique enfin… Si l’« homme » moderne, supposé être le sujet qui gouverne le monde, n’est plus qu’une illusion, les humanités en tant que recherches sur l’homme sont-elles aussi destinées à la faillite ? En se référant aux réflexions passées et présentes de la littérature et de la philosophie, quatre intervenants s’interrogent sur les humanités en cette ère « post-humaine ».

【Contenu de conférence】
Atsuo MORIMOTO
Introduction : Du « Non-humain » au « Post-humain »

Gilles Philippe
Posthumanisme et stylistique

Masanori TSUKAMOTO
Poétique de l’inhumain : De « La Déshumanisation de l’art » d’Ortega y Gasset à « L’Institution » de Merleau-Ponty

Masatake SHINOHARA
Le post humanisme au cœur de la fragilité du monde :
la pratique photographique de Kawauchi Rinko et les idées de Timothy Morton sur l’écologie

【Inscription】
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https://zoom.us/webinar/register/WN_f4_GZW8eTCmGofte_La7Fg

【Limitation de responsabilité】
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Programme à télécharger : ici
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