Nous avons eu le regret d’apprendre la disparition de notre collègue madame Laurence Caillet.
Sophie Houdart et les membres du laboratoire en anthropologie de Nanterre ont composé le texte suivant, que nous vous transmettons :
« Nous avons l’immense tristesse d’apprendre que Laurence Caillet est décédée dans la nuit
du 21 au 22 octobre. Nos pensées vont à son mari et à leur fille.
Après avoir commencé des études de médecine et d’arabe, Laurence Caillet est devenue
en 1970 journaliste au Bureau international de la radiodiffusion télévision japonaise (NHK),
et s’est formée à l’ethnologie à l’université de Tokyo. De retour en France, elle a obtenu son
doctorat à l’INALCO, puis plus tard son HDR à l’EHESS. Chargée de recherche au CNRS,
elle a été rattachée au Collège de France avant de devenir professeure au Département
d’anthropologie de l’université Paris Nanterre et de rejoindre le Laboratoire d’ethnologie et de
sociologie comparative. Elle a assuré de nombreuses fonctions au sein de nos institutions de
recherche et d’enseignement, occupant tour à tour les postes de directrice du Laboratoire
d’ethnologie et de sociologie comparative, de directrice du Département d’anthropologie de
l’université Paris Nanterre, de chargée de mission auprès de la présidence de cette même
université, et de directrice scientifique adjointe de l’Institut des sciences humaines et sociales
du CNRS.
Laurence a mené de nombreuses enquêtes dans le Kansai, le Tohoku et à Tokyo, sur les
rituels saisonniers d’abord (Fêtes traditionnelles en Asie : Japon publié en 1984 ou Fêtes et
rites des 4 saisons au Japon en 2002), puis plus généralement sur les processus de
construction des savoirs religieux (Ethnographies japonaises en 2006) et la manière dont ils
venaient se frotter à une modernisation galopante (La maison Yamazaki en 1991 ou Démons et
merveilles. Nuits japonaises en 2018). Soucieuse de restituer le grain des situations vécues
sans rien ôter de leur complexité et de leurs nuances, elle a porté une grande attention à
l’écriture, tant celles auxquelles avaient recours ses interlocuteurs que la sienne propre. Le
Japon, disait-elle, « est un grand pays moderne où le mot “ethnologie” appartient au langage
ordinaire d’une population très éduquée » (Caillet 2006). De sorte que, dès lors que l’on se
donne pour tâche de « pénétrer les arcanes d’un savoir local extrêmement construit » (ibid.),
les informateurs sont parfois, à un degré ou à un autre, des collègues. Pointant, bien avant que
cela ne devienne la norme, l’importance de la réflexivité et du « travailler avec » plutôt que du
« travailler sur », elle invitait à compliquer la posture d’enquête, en intégrant une
connaissance du savoir du Japon sur lui-même et un appareil critique spécifiques, sans cesse à
réinterroger, et ce jusque dans l’écriture.
De nombreux étudiants et collègues se rappelleront son intelligence, sa rigueur, sa
curiosité, sa générosité, son humour également. Travailler à ses côtés a été un plaisir et a
contribué à former durablement des manières de pratiquer la discipline et d’approcher le
Japon. Jusque dans la maladie qui l’a touchée durement ces dernières années, elle parvenait à
cultiver un art de la distance et de l’observation qui finit d’honorer la discipline qu’elle a
magnifiquement servie. »
Les obsèques seront célébrées le lundi 30 octobre à 14h30 à l’Eglise Saint Romain, rue de
l’Eglise, 92310 Sèvres, suivies de l’inhumation au cimetière de Sèvres, 42-44 Rue de la
Garenne, 92310 Sèvres.