Colloque « Japon sonore : modernité, constructions sociales, rapports de force »
14 & 15 novembre 2024
Université Bordeaux Montaigne

Le colloque vise à accueillir des communications portant, entre autres propositions, sur :

  • le rôle du son dans la représentation et la construction des identités sociales et culturelles ;
  • le son comme donnée mesurable et objectivable, dès lors comme outil politique de normalisation des représentations et du rapport à l’autre ;
  • le son comme moyen d’administration et de discipline, d’assourdissement et d’aphonie ; comme instrument de pouvoir et de contre-pouvoir ;
  • l’usage de la technologie et des médias sonores dans la construction d’espaces sensoriels, affectifs ou mémoriels déterminés ;
  • la relation entre espace physique et espace imaginé dans les pratiques de production et de consommation du son ;
  • les défis liés à la préservation des « paysages sonores » au sein d’une nature transformée et transformante ;
  • le son comme élément de dynamiques plurimédiatiques ou transmédiatiques complexes.

Le son tel que nous l’abordons ici est considéré dans ses diverses formes et acceptions. Il inclut la musique, la voix, le bruit. Il est également à comprendre dans ses formes translatées par le biais de l’image et de l’écrit.

L’attention se porte ici principalement sur le Japon. Les propositions élargissant la perspective à l’aire asiatique, voire, à des fins comparatives, à d’autres zones quelle qu’en soit l’échelle, sont bienvenues. 

Nous invitons les enseignants-chercheurs, les étudiants post-doctorants, doctorants et en master, les chercheurs indépendants et autres spécialistes du son à participer à l’appel à communication.

Appel à communications à télécharger sur ce lien.

Les propositions devront être constituées d’un titre, d’un résumé d’environ 200 mots, de l’affiliation si applicable, ainsi que d’une adresse mail de contact, à faire parvenir à l’adresse japosono@gmail.com jusqu’au 30 avril 2024.

Les réponses à l’appel seront données avant juillet 2024.

Des recherches ethnographiques et historiques récentes ont montré que les pratiques de production et d’écoute sonores et musicales sont liées aux constructions sociales, notamment à la question de l’identité et aux rapports de force (Mitsui, Hosokawa 2005 ; Wajima 2010 ; Hankins, Stevens 2014 ; Kheshti 2015 ; Manabe 2015 ; Novak, Sakakeeny 2015 ; Radano, Olaniyan 2016 ; Plourde 2019 ; Chenhall, Kohn, Stevens 2021 ; Haukamp, Hoene, Smith 2022 ; Skelchy, Taylor 2022). Ces études suggèrent que la relation entre le son et la vie quotidienne doit être comprise à l’intérieur de contextes culturels spécifiques, c’est-à-dire au sein de cadres temporels, spatiaux et sociaux déterminés. Ainsi la dissémination globale des technologies et l’uniformisation des techniques de production et de médiation du son depuis l’époque moderne sont des phénomènes qui immanquablement s’accompagnent d’actes de réappropriation et de réinterprétation du son, qu’il soit déterminé comme naturel ou artificiel, ainsi que des manières de l’entendre. Interroger comment est fait, médiatisé et reçu le son, c’est de la sorte mettre au jour une tension politique fondamentale entre ce qui peut être ramené au couple entendre et se faire entendre ; c’est se renseigner sur des processus d’exploration du rapport à l’autre et d’affirmation psychique et sociale d’un soi, d’un espace, d’une « oreille », individuels ou collectifs ; c’est repenser les structures du pouvoir à travers les empreintes, et l’écologie desquelles elles dépendent, d’une forme transitoire.

En suivant le questionnement ci-dessus, le colloque a pour intention d’identifier des zones de friction historiques et sociales qui potentiellement invisibles ou peu renseignées sont cependant proprement non muettes ; de scruter les dispositifs médiatiques et techniques de construction et d’expression par le son d’identités déterminées ; d’examiner de quelle manière le son se constitue comme un instrument de contrôle ou de résistance, de cohésion ou de dispersion des forces, d’unification ou de segmentation d’espaces, au sein des multiples trajectoires, qu’elles soient internationales, nationales ou locales, qui accompagnent les changements relatifs à la société japonaise moderne et contemporaine ; d’explorer des représentations liées au son et à l’écoute, qui, en réalité rarement isolées sur les plans médiatique et sensible, sont transférées depuis ou vers d’autres objets et modalités de perception. Il s’agit de ce fait de tracer de nouvelles lignes de compréhension du pays et de ses habitants, à diverses échelles humaines et spatiales, dans la continuité de ce que les études antérieures sur le son ont apporté pour poursuivre le travail de décentrement d’un regard, et d’une oreille, dont la perspective a souvent été occidentale.

Longtemps resté en retrait par rapport à la culture visuelle et à la littérature, des formes discursives dont les traces imprimées, sculptées ou peintes même anciennes nous sont souvent immédiatement saisissables car médiatiquement disponibles, le son, fuyant par nature, est aujourd’hui un objet d’étude sur lequel commence à se pencher la recherche sur les modernités. Compris dans ses dimensions matérielle, sensible et performative, le son aura nécessité le déploiement d’approches pluridisciplinaires incluant l’histoire, l’anthropologie, la sociologie dans ses multiples champs d’application, la science politique, la musicologie et les études culturelles pour composer au mieux avec un objet agissant en profondeur à divers endroits de la société : une configuration de recherche dont le colloque que nous proposons tire également parti pour affiner considérablement la compréhension de phénomènes intégrateurs et de coercition complexes.