Conférences / Agenda de l’EFEO (juillet 2021)

L’EFEO/ISEAS Kyoto organise régulièrement des événements académiques (conférences, journées d’étude). Les activités du centre figurent sur l’agenda de l’EFEO qui est consultable en ligne (https://www.efeo.fr/), sur notre page Facebook (https://www.facebook.com/efeokyoto/) ou sur le site de la Scuola Italiana di Studi sull’Asia Orientale (ISEAS ; https://iseas-kyoto.org/). Une conférence est au programme en juillet. Elle se tiendra uniquement en ligne. Nos événements sont ouverts à tous. N’hésitez pas à transmettre l’information à vos étudiants ou collègues.  

Agenda EFEO Kyoto (juillet 2021) 

Dans le cadre des Kyoto lectures,Daimaru Ken (université de Paris) présente la conférence : Health and Modern Warfare. Locating Medical History in Japan’s Long Nineteenth CenturyLundi 19 juillet à 18h (heure du Japon) sur la plateforme Zoom. Le lien ainsi que le mot de passe permettant de se connecter seront affichés sur le blog du Centre de Kyōto et sur le site internet de l’ISEAS la veille.https://www.facebook.com/events/834115250815682/?ref=newsfeed

Table-ronde / « Hikikomori – Une expérience de confinement », EHESS (1er juillet 2021, 16h-18h)

Hikikomori – Une expérience de confinement

La Fondation France-Japon de l’EHESS est heureuse de vous inviter à la table-ronde autour de l’ouvrage Hikikomori – Une expérience de confinement en présence des auteur·es.

Le confinement, désormais dans tous les discours, est une notion qui évoque aussi le retrait des jeunes confinés dans leur chambre ; un phénomène d’abord identifié et nommé hikikomori au Japon dans les années 1990. Les conduites de ces jeunes posent de nombreuses questions, aux familles, aux institutions éducatives et de santé, qui inventent et expérimentent des méthodes pour les accompagner. Aucune explication simple ne s’impose pour comprendre leur retrait soudain. Sans pathologie physique, souvent sans diagnostic médical, ils représentent une énigme. Un collectif de chercheurs et cliniciens propose d’aborder ces jeunes comme des sujets pensants et agissants, qui questionnent, bousculent et parfois détournent les formes de soin et de prise en charge. De leur place, ils interpellent la façon dont sont pensées la sortie de l’enfance et la transition vers l’âge adulte. Ce livre s’adresse aux jeunes en retrait, aux professionnels éducatifs et soignants, à toute personne touchée de près ou de loin et à tous ceux qui s’interrogent sur ces nouvelles générations de reclus, néanmoins connectés au monde.

  • 1er juillet 2021 | 16.00-18.00 (France) | 23.00-1.00 (Japon)
  • En ligne et sur place – En français
  • Introduction : Sébastien Lechevalier (FFJ-EHESS)
  • Auteur·es présent·es : Cristina Figueiredo (Université de Paris), Claude Martin (CNRS, École des hautes études en santé publique), Natacha Vellut (CNRS, EHESS, Université de Paris, INSERM, EPFCL)
  • Discutant·es : Christian Galan (Université de Toulouse), Anne-Lise Mithout (Université de Paris)

Conférence / « Usages sociaux et politiques du droit en France et au Japon. Exemples de mobilisation autour de causes », Maison Franco-Japonaise de Tokyo (24 juin 2021, 18h-20h HdT)

Usages sociaux et politiques du droit en France et au Japon.
Exemples de mobilisation autour de causes

L’Institut français de recherche sur le Japon à la Maison franco-japonaise en collaboration avec la Fondation France-Japon de l’EHESS a le plaisir de vous inviter à la quatrième conférence du cycle « Judiciarisation des enjeux sociaux et environnementaux au Japon et en France ».

Quatrième conférence : 

Usages sociaux et politiques du droit en France et au Japon.
Exemples de mobilisation autour de causes

Jeudi 24 juin 2021
18 h – 20 h (JCT/ UTC+9)
En ligne
Traduction simultanée en français et en japonais

Liora ISRAËL (EHESS)
« Usages sociaux du droit en France : une perspective de sociologie politique »

Mon intervention portera sur les enjeux à la fois théoriques et empiriques d’une perspective de sociologie politique sur les usages du droit. J’aborderai dans un premier temps l’apport de travaux d’origine états-unienne, notamment du courant Law and Society, en termes de catégories d’analyse (cause lawyering, legal mobilization theory). J’aborderai ensuite la question de la transposition raisonnée de ces catégories en France, afin de mettre en évidence l’intérêt de l’analyse de mobilisations autour de causes, en s’intéressant tout particulièrement sur la place du droit et de la justice. Pour cela j’aborderai différents exemples, certains plutôt historiques, d’autres au présent.


IIDA Takashi (université de Tokyo)
« L’action en justice pour construire le futur : un état des lieux de la situation actuelle au Japon »

Au Japon, depuis la période de Haute croissance (1955-1973), il semblerait que les contentieux jouent un rôle de plus en plus important dans la fabrique des politiques publiques. Toutefois, les avis divergent sur la question de savoir si ces recours en justice ont donné lieu à une « judiciarisation » et à des changements sociaux. En effet, le rôle du pouvoir judiciaire dans le processus de changement social et de l’action publique dépend de la nature du mouvement social, de son niveau de mobilisation, de la connaissance de la loi et du droit par ses acteurs, ou encore de leurs attentes vis-à-vis des tribunaux. Dans cette présentation, j’examinerai la place du droit dans la vie quotidienne des Japonais, en particulier leur conception de la notion d’intérêt collectif à l’aide de données empiriques et ainsi développer des sujets de comparaison et de discussion sur le thème de la « judiciarisation » entre la France et le Japon.

Discutant : TAKAMURA Gakuto (université Ritsumeikan)
Modératrice et responsable du cycle de conférences : Adrienne SALA (IFRJ-MFJ) 
Inscription obligatoire : www.mfj.gr.jp/agenda/2021/06/24/judiciarisation/

Conférence / Intervention de Michael LUCKEN et de UEHARA Mayuko dans le cadre des activités du Groupe d’étude de philosophie japonaise (samedi 26 juin 2021, 9h30-12h00)

Groupe d’étude de philosophie japonaise 

(Institut français de recherche sur l’Asie de l’Est UMR 8043, Inalco / Université de Paris / CNRS)

Demi-journée d’étude « Qu’est-ce que l’histoire de la philosophie japonaise ? » avec Uehara Mayuko (Université de Kyôto) et Michael Lucken (Inalco-IFRAE)

Samedi 26 juin 2021, vidéoconférences sur Zoom 

9h30-12h00 heure de Paris, 16h30-19h00 heure de Tokyo

Pour obtenir le lien Zoom, merci de bien vouloir remplir la formule de pré-inscription :
https://ifrae.cnrs.fr/evenements/quest-ce-que-lhistoire-de-la-philosophie-japonaise/

Résumés:  

Michael LUCKEN (Inalco-IFRAE)

      « De l’histoire de la philosophie comme parlementarisation des âmes » 

Il existe un consensus parmi les historiens pour dire avec Jack Goody qu’il s’est produit un « vol de l’histoire » des peuples du monde, que les peuples extra-occidentaux ont été privés de leur histoire par la science coloniale. Qu’il y ait pu y avoir aussi un « vol de la philosophie » n’apparaît en revanche pas aussi clairement, car la définition même de la philosophie est beaucoup plus disputée que celle de l’histoire.

Après avoir remis en perspective les différents rapports que la philosophie occidentale a entretenus au cours des xixe et xxesiècles avec ses marges, nous tenterons dans cette présentation de définir, au travers de l’exemple de la constitution d’une philosophie académique au Japon, les conditions d’une pensée qui accepte l’intégration con-tentieuse et démocratique de la pluralité de l’imagination des fins.

UEHARA Mayuko (Université de Kyôto)

      « L’orientation de la philosophie japonaise : l’émotion chez Nishida ou la pratique chez Tanabe »

La présente communication se focalise sur Nishida Kitarô et Tanabe Hajime, les deux auteurs les plus représentatifs de la philosophie japonaise, plus précisément de l’école de Kyoto. Il s’agit de faire une étude comparative entre leurs pensées du point de vue du sentiment (感情) ou de l’émotion (情). Pour Nishida, le sentiment et l’émotion sont les fondements incontournables de la logique ; il s’oriente donc vers une construction logique de sa philosophie à partir de l’émotion dès la seconde moitié des années 1910. Quant à Tanabe, qui répugne à l’intuitif et au contemplatif (観想的), il poursuit une logique qui insiste radicalement sur l’acte pratique. Pourtant, en fin de compte, Tanabe a persisté dans un mode de pensée saisissant scientifiquement l’émotion et le sentiment. Le domaine appelé « philosophie japonaise » a été inauguré durant la modernisation du Japon à l’occasion de l’introduction de la philosophie occidentale. Et si l’on admet ce fait, on peut dire que Nishida et Tanabe ont tous deux construit une philosophie qui s’efforce de dépasser la pensée dualiste de l’Occident moderne. Nishida prend la position du monisme en construisant la logique sur la base de l’émotion, alors que Tanabe la nie avec fermeté et exprime le conflit entre la logique et l’émotion dans sa philosophie. Afin de montrer la différence et l’opposition entre ces deux philosophes japonais, je traiterai le problème des rapports entre l’émotion et la philosophie en m’appuyant sur leurs discours sur l’art. 

contact courriel : takako.saito@inalco.frakinobukuroda@gmail.comarthur.mitteau@univ-amu.frsimon.ebersolt@gmail.com— 

Conférence / « Scriptures and Their Deployment: Great Notes (Maka shō), Raishin’s Notes (Raishin shō), and the Sacred Works (Shōgyō) of Early Medieval Japan » par Brian Ruppert (séminaire de l’EFEO – 18 juin 18h, heure de Tokyo)

Dans le cadre des Kyoto lectures de l’EFEO, Brian Ruppert (université de Kanagawa) présente la conférence : Scriptures and Their Deployment: Great Notes (Maka shō), Raishin’s Notes (Raishin shō), and the Sacred Works (Shōgyō) of Early Medieval Japan

Date le et lieu : Vendredi 18 juin à 18h (heure du Japon) sur la plateforme Zoom. 

Le lien ainsi que le mot de passe permettant de se connecter seront affichés sur le blog du Centre de Kyōto et sur le site internet de l’ISEAS la veille.

Conférence / “Le commerce des jonques chinoises dans le Nagasaki pré-moderne : une étude des intermédiaires dans les échanges commerciaux ” par PENG Hao (Séminaire Kyūshū 4 juin 2021, 10h-12h)

Dans le cadre de la prochaine séance du séminaire Kyūshū qui se tiendra le vendredi 4 juin 2021 de 10h à 12h, PENG Hao (Université Municipale d’Osaka) fera une présentation intitulée 「近世長崎の唐船貿易―輸出入品の仲介商に焦点を当てて―」(Le commerce des jonques chinoises dans le Nagasaki pré-moderne : une étude des intermédiaires dans les échanges commerciaux).

La présentation aura lieu en japonais, sans traduction.

Elle se tiendra sur Zoom. La séance est ouverte à tout.e chercheur.se et étudiant.e intéressé.e. Si vous n’avez jamais assisté au séminaire et si vous souhaitez assister à la séance, merci de vous signaler auprès des organisateurs.

Contact :
Annick Horiuchi (horiuchi@univ-paris-diderot.fr)
Pierre-Emmanuel Roux (pierre-emmanuel.roux@u-paris.fr)


* Peng Hao est notamment l’auteur de : 

『近世日清通商関係史』  (東京大学出版会, 2015)
(traduction anglaise) Trade relations between Qing China and Tokugawa Japan : 1685-1859 (Springer, 2019) 

Conférence / « The Rickshaw and the Railroad: Human-Powerd Transport in the Age of the Machine » par Kate McDONALD (cycle de conférences « Global Japon(s) », 2 juin 2021 13h-14h30)

Dans le cadre du cycle de conférences Global Japon(s), le Centre de Recherches sur le Japon de l’EHESS a le plaisir de vous inviter à la conférence suivante :

The Rickshaw and the Railroad: Human-Powerd Transport in the Age of the Machine

Kate McDonald (University of California, Santa Barbara)

Mercredi, 2 juin 2021, 13h-14h30

Pour recevoir les documents préalables à la séance ainsi que le lien de la salle virtuelle, merci de vous inscrire à : crj@ehess.fr

Conférence / Interventions de KUWAYAMA Yukiko et de Raphaël PIERRES dans le cadre des activités du Groupe d’étude de philosophie japonaise (samedi 29 mai 2021, 9h30-12h00)

Groupe d’étude de philosophie japonaise 

(Institut français de recherche sur l’Asie de l’Est, Inalco / Université de Paris / CNRS, F-75013 Paris)

Communications
Samedi 29 mai 2021, vidéoconférences sur Zoom 
9h30 -12h00 l’heure de Paris, 4h30 – 7h00 PM l’heure de Tôkyô

Programme

9h30-10h10 

KUWAYAMA Yukiko  (Université Hildesheim, Inalco)

« Ki, perception, sentiment – une phénoménologie linguistique de l’expérience antéprédicative »

10h10-10h25 questions – réponses 
10h25-10h35  pause

10h35-11h15 

Raphaël PIERRES (Université Paris I-Panthéon Sorbonne )

« Grammaire du kokoro (心) »

11h15-11h30 questions – réponses 
11h30-12h   discussion générale 

12h00  (7h00 PM l’heure de Tôkyô) la fin de séance 

Pour le lien Zoom, prière de contacter : takako.saito@inalco.fr
contact courriel : takako.saito@inalco.frakinobukuroda@gmail.comarthur.mitteau@univ-amu.fr, simon.ebersolt@gmail.com

Résumé (KUWAYAMA Y.)

   Dans cet exposé, nous allons présenter un résumé de notre thèse qui s’intitule à l’origine, en allemand, « Ki, fühlen, empfinden – eine linguistische Phänomenologie vorprädikativer Erfahrungsformen ». Elle est caractérisée par une méthodologie linguistique phénoménologique. Pour approcher la dimension antéprédicative de l’expérience qu’on peut désigner comme « perception et sentiment », nous posons quelques étapes : dans un premier temps, nous allons contextualiser la thèse du discours phénoménologique confronté directement à la diversité des langages naturels, notamment concernant la description de phénomènes ; dans un deuxième temps, nous introduirons le mot ki à l’aide des traductions processuelles d’expressions en utilisant un lexique ; dans un troisième temps, nous ferons le parallèle entre les deux domaines ki et Gefühl dans la langue allemande. Partant d’un repérage des similarités entre ces deux champs notionnels avec un focus sur l’approche de Yuho Hisayama basée sur la « nouvelle phénoménologie » chez Hermann Schmitz et Gernot Böhme, nous analyserons la différenciation des deux domaines.

        Le mot ki a beaucoup de sens différents. On le remarque notamment quand on compare ses traductions possibles entre le japonais et les autres langages naturels. Le domaine ou le champ notionnel ki (comme l’ensemble des sens de l’expression, ce que J.L. Austin désigne comme word meanings) peut apparaître plus vaste que celui du mot Gefühl en allemand. Le sens d’« attention » (par exemple ki o tsukeru – faire attention) est un bon exemple. Les traductions comme « en un souffle » (in einem Atemzug, , 一気に, ikki ni), « l’air » (Luft, 空気, kūki), « l’intention » (Intention, 気になる, ki ni naru1, 気にする ki ni suru 2), « le courage » (Mut, Mutig-Sein, 勇気 yūki), ou « le mode de vouloir et l’être énergétique » (Wollen und Kraftvoll-Sein, 志気 shiki ou 意気 iki) peuvent clairement souligner la diversité des sens du mot. Le mot ki peut exprimer différents caractères de l’homme et du monde comme la matérialité, la corporalité, la spiritualité, l’affectivité ou l’émotionnalité. Ainsi, le mot ki peut paraître complexe à traduire. En comparaison, le mot kokoro ( 心 , Herz ou Herzgeist,3 cœur) a son noyau sémantique à la dimension d’expérience plus privée des sentiments, même s’il peut toucher également des dimensions de sentir, comme le mot ki.4 Outre une introduction historique à propos de la distinction de kokoro et ki de néoconfucianisme, nous travaillons à trouver un axe entre une approche orientée spatialement (phénoménologie de l’atmosphère et ki comme l’approche de Hisayama, Schmitz et Böhme) et de la perspective de la première personne, qui sent et parle de son cœur (心の内を打ち明ける kokoro no uchi o uchiakeru).

        De cette manière, nous arrivons à toucher la frontière entre dimension de l’expérience antéprédicative et prédicative au moyen des expressions verbales et concrètes. Dans le cadre de l’exposé, nous avons choisi de nous concentrer sur la dimension antéprédicative au moyen d’idées merleau-pontiennes comme la « pensée sauvage » ou l’« existence brute et préalable ». Il apparait que même cette étape puisse tourner autour du cœur (心) qui change (心変わり kokorogawari) comme la météorologie (天気, tenki), mais qui prend des décision (決心する) de temps en temps et qui trouve sa paix (穏やかな心) également de temps à autres.

 1. L’expression « ki ni naru » (気になる) peut être traduit comme « quelque chose me concerne » en français.
2. L’expression « ki ni suru » (気にする) peut être traduite comme « s’inquiéter de quelque chose » ou « se préoccuper de quelque chose ». J’ai hâte de poser de telles questions ouvertes dans le cadre de mon exposé concernant les traductions des expressions en français.
3.  Wohlfahrt (2001): p. 17.
4.  c.f. Yamaguchi (1997): p. 61., Kimura (1995): p. 126f., Hisayama (2014): p. 89.

Résumé (R. PIERRES)

Nous mobilisons ici la notion japonaise de 心 comme outil pour dépasser – ou problématiser –le partage entre intérieur et extérieur. 心 (kokoro) est l’un des termes les plus couramment utilisés en japonais pour désigner le mental, quoiqu’il englobe une dimension affective : en ce sens, il renvoie à la fois au coeur et à l’esprit, et semble subsumer la séparation entre pensée et corps (de fait, nous le retrouvons également comme clé dans le verbe 思う, omou, penser). Nous cherchons ici à en déployer les implications. Les coordonnées de notre interrogation peuvent être posées en situant la notion de 心 à l’aide des outils proposés par Ricoeur dans le quatrième chapitre de L’homme faillible, en particulier vis-à-vis des notions de sentiment et de θυμός (thumos).
Dans ce cadre conceptuel, nous nous attachons plus spécifiquement à analyser la portée et les limites de la notion de 心 en regard du problème de la localisation du mental. Ce problème trouve une première traduction remarquable dans la philosophie de Nishida autour de l’idée que l’esprit doit et ne peut pas être localisé dans le monde. C’est sous cet angle que nous commençons à saisir en quoi la notion de 心 ouvre à une forme de dépassement de l’intériorité, en tant que notion mixte. Comme Nishida l’indique dans un article de jeunesse, 心の内と外, il n’y a pas d’un côté le monde intérieur, de l’autre, le monde extérieur : en ce sens, le 心 n’est ni intérieur ni extérieur. En s’appuyant sur ce caractère mixte du 心, il est possible de tendre vers une forme de monisme. Au début de son travail, dans 善の研究, Nishida accorde une grande importance à l’expérience pure (純粋経験) où la distinction entre intérieur et extérieur n’a pas cours, à la manière du mouvement instinctif de l’animal, ou de la perception du nouveau-né. Le paradoxe tient à ce que si pensée et étendue ne sont pas deux ordres logiques ou ontologiques strictement distincts, alors la question du lieu de la pensée doit être reposée.
D’un deuxième point de vue, la notion de 心 signale en effet l’ancrage du soi dans la chair : elle joue à la fois comme point d’application des catégories spatiales à l’esprit, en tant qu’il est associé à un corps particulier, situé dans un espace déterminé. Pour aborder cette tension d’une manière plus aisément compréhensible, nous ouvrirons ici une étude de cas, que nous désignons provisoirement comme grammaire du 心. L’enjeu de cette enquête lexicologique est de rendre plus concrète la question théorique de l’incarnation de l’esprit. Si son premier objet est bien l’observation d’expressions courantes en japonais afin d’en mesurer la portée, il faut toutefois faire un pas de plus. En effet, la mention par Nishida de l’éthique et de l’esthétique comme chemins pour retrouver cette indistinction nous invite à étudier des usages remarquables dans les textes poétiques, mais aussi dans certains textes bouddhiques classiques. Ces analyses ponctuelles ont pour horizon une conception non-naturaliste de l’incarnation, dans le fil de ce que Merleau-Ponty désigne, en particulier dans ses cours de 1954 au collège de France, comme « l’institution des sentiments ».

Ce caractère institué du sentiment permet enfin de remettre en question le caractère privé que semblait d’abord impliquer la notion de 心. L’influence de la polémique analytique contre l’intériorité conduit ainsi Ōmori à souligner que les sentiments ne sont pas indépendants des situations, contre la tendance à les renfermer dans le coeur. La critique de l’intériorité dans 物と心 engage à la fois une dimension épistémologique, en tant qu’il s’agit de dépasser la distinction entre la chose et sa représentation. C’est bien l’intériorité du coeur qui se trouve battue en brèche (「心」には「中」がないのである。) Ce qui était tenu pour le plus intime, l’au-dedans radical, est projeté d’un même mouvement dans la dimension d’un environnement et d’une atmosphère. Faisant retour vers notre point de départ, il faut bien, à la fin, poser à nouveau la question, afin de mesurer apports et apories de cette proposition singulière : la philosophie du 心 est-elle enfin la « philosophie du coeur » que Ricoeur appelait de ses voeux, pour dépasser un certain partage entre intériorité et extériorité ?

Conférences / Agenda de l’EFEO (mai 2021)

L’EFEO/ISEAS Kyoto organise régulièrement des événements académiques (conférences, journées d’étude). Les activités du centre figurent sur l’agenda de l’EFEO qui est consultable en ligne (https://www.efeo.fr/), sur notre page Facebook (https://www.facebook.com/efeokyoto/) ou sur le site de la Scuola italiana di studi sull’asia orientale (ISEAS ; https://iseas-kyoto.org/). Deux conférences sont au programme en mai. Elles se tiendront uniquement en ligne. Nos événements sont ouverts à tous. N’hésitez pas à transmettre l’information à vos étudiants ou collègues. 

Agenda EFEO Kyoto (mai 2021)

– Le 21 mai, de 17h à 19h (heure du Japon), le centre EFEO-ISEAS organise un événement (en japonais) autour de la parution du livre de Lawrence MARCEAU (ISEAS) sur l’unique rouleau illustré complet des fables d’Esope (Rinsen shoten, 2021, 絵入巻子本 伊曽保物語 ―臨川書店 (rinsen.com)). Kishimoto Emi (université d’Osaka), Hyôdô Toshiki (université de Wakayama) et Lawrence Marceau feront des présentations en rapport avec le rouleau et les fables d’Esope dans le Japon d’Edo. Araki Hiroshi (International Research Center for Japanese Studies) sera discutant. L’événement se tiendra en ligne sur la plateforme Zoom. Pour s’inscrire utiliser le code QR du poster ou écrire au centre EFEO-ISEAS. 

– SAKA Chihiro (université Ryûkoku) présente la conférence : Datsueba’s Role in Structuring the Religious Landscapes: An Examination of the Precinct of Risshakuji and the Pilgrimage Route to Atsuta Shrine. Vendredi 28 mai à 18h (heure du Japon) en format hybride ou uniquement sur la plateforme Zoom. 

Conférence / « Traduire la littérature humoristique française au Japon – le cas des oeuvres de Cami » par Gérald Peloux (séminaire transversal du CRCAO, 7 mai 2021, 11h-13h)

Titre de la conférence et informations

« Traduire la littérature humoristique française au Japon : le cas des œuvres de Cami« 

Gérald Peloux, CY Cergy Paris Université, UMR Héritages, CRCAO

Date : 7 mai 2021 11h-13h

Info pour lien zoom :
– lara.maconi(at)college-de-france.fr
– xiangyun.zhang(at)u-paris.fr

Résumé

À partir des années 1920, le Japon est pris d’une frénésie de traductions d’œuvres des grands auteurshumoristiques occidentaux : Mark Twain, P.G. Wodehouse, Stephen Leacock, Jerome K. Jerome, etc. chez les anglophones, les frères Fischer, Alphonse Allais, Georges Courteline, Tristan Bernard, Cami, etc. chez les

francophones. Durant les mêmes années, de nombreuses anthologies de l’humour paraissent tandis que le mot-valise, ero-guro-nansensu, vient affirmer l’importance du nonsense (nansensu) à côté de l’érotisme et du grotesque. À travers l’exemple de Cami, un des chantres de l’humour loufoque à la française, nous voudrions présenter durant cette séance le contexte dans lequel ce phénomène d’introduction de l’humour occidental se produit et comment l’humour – réputé souvent intraduisible – a pu être transmis. Nous voudrions aussi présenter l’évolution ultérieure des traductions de cet auteur.

Biographie du conférencier

Gérald Peloux est maître de conférences à CY Cergy Paris Université. Il est spécialiste de littérature populaire japonaise de l’entre-deux-guerres. Il travaille actuellement sur l’œuvre de Tani Jōji dont il a traduit en 2019 un recueil de nouvelles aux Belles Lettres, Chroniques d’un trimardeur japonais en Amérique qui a obtenu en 2021 le prix d’encouragement de la traduction littéraire décernée chaque année par la fondation japonaise Konishi

Lien vers le poster de l’événement ici.